DIJON (21)
Hôtel du Commandant Militaire
(Voir la page consacré au Pavillon Benigne Serre)
(voir la page d'accueil de Dijon)


Connu de nos jours pour son portail et ça façade néoclassique, le numéro 41 de la rue Vannerie était à l'origine une simple maison de style gothique. Edifiée au alentour de 1349 pour un bourgeois Dijonnais nommé Jehan Amée, elle devait être assez proche stylistiquement des demeures du centre-ville. Occupant les fonctions de clerc à la cour de Langres, Jehan Amée est mentionné dans la dotation d'une chapelle en 1351 et pour l'achat de plusieurs vignes. N'ayant pas le droit de se marier ni par conséquent d'avoir des enfants, ça demeure revint à ça nièce Jeanne Artaud et a son mari Philippe Géliot. Maire de la ville en 1373-1374 et recteur de l’hôpital de la Maladière, celui-ci laissa, ça demeure à ces fils Jean et Philippot, qui furent les principaux marchands de vin Dijonnais à la fin du XIVeme et au début du XVeme siècle. Préférant des demeures plus vastes, ceux-ci vendirent dans le premier quart du XVeme siècle leur maison à Quentin Ménard (1382-1462). Originaire de Flavigny-sur-Ozerain, ce personnage fut à la fois homme d'église, diplomate et mécène. Ayant commencé ça carrière comme clerc des offices de l’hôtel de Jean sans Peur entre de 1407 et 1409, il continua celle-ci en tant que secrétaire du duc en 1412. Précepteur du duc Philippe-le-Bon en 1420, il poursuivit sont ascension en tant que chanoine de la Sainte-Chapelle, fut archidiacre de Châlons-sur-Marne en 1425 et prévôt de Saint Omer en 1426. Nommé évêque d'Arras en 1439, il fut l'ambassadeur du duc à Rome et à Londres et occupa finalement l’archevêché de Besançon de 1439 à 1462.


Jean Jouard
priant Saint-Mamès
Manuscrit à miniature de la Bibliothèque de Vesoul
XVeme siècle
Ayant probablement fait quelques travaux dans son hôtel de la rue Vannerie, il le délaissa peu à peu pour les châteaux de Bregille à coté de Besançon et de Gy en Haute-Saône qu'il fit reconstruire vers 1440. Réalisant également d'important travaux dans l'église Saint-Genest de Flavigny dont il était originaire, il poursuivit son mécénat à Besançon en dotant l'église Saint-Jean d'un buffet d'orgue et en modifiant les bâtiments de l’archevêché. Ca dernière œuvre fut son tombeau exécuté pour la cathédrale Saint-Jean de Besançon. Après le décès de Quentin Ménard, la demeure changea de nouveau de propriétaire. Acquis par Jean Jouard en 1470, les lieux virent celui-ci devenir président au parlement de Bourgogne en 1476, puis le 26 juin 1477 être massacré lors de la rébellion dite des "Mutemaque". Auparavant, Jean Jouard avait été seigneur d'Echevanne, il avait également été bailli de Vergy en 1436, conseiller du duc Philippe-le-Bon en 1457 et maître des requêtes à Besançon. Marié à Nicole de Falletans vers 1452, il avait eu plusieurs enfants de celle-ci. Après la mort tragique de Jean Jouard, l'hôtel changea de nouveau de main et fut acheter par Claude de Mailly, seigneurs d'Arcelot en l'année 1477. Conservé par ça famille pendant prés d'un siècle, les terres d'Arcelot et la maison furent achetées par Alain de Lestrade de la Cousse lors de ça venue en Bourgogne en 1581 pour la tenue des Etats de Bourgogne. Originaire du Périgord, Alain de Lestrade était capitaine de cent hommes d'armes et avait épousé Claude-Françoise de Baissey en 1599. Connu pour ces problèmes avec la justice, il reçut en 1635 une injonction de la cour afin de contrôler la gestion de l'hôpital d'Arceau dont il avait la charge. L'affaire ayant probablement mal tourné, il fut contraint de céder ça demeure à Lazare Robelin en 1639.

Marié en 1635 avec Marie de Villers, ce personnage était issue d'une famille de parlementaire et fut baron de Saffres, conseiller du roi et second président au parlement de Bourgogne en 1634. Lazare Robelin n'ayant eu qu'une fille, l'hôtel fut acquis par Philippe de Villers (frère de Marie) en 1666. Issue lui aussi d'une famille de parlementaire Bourguignon, Philippe fut conseiller en 1630 et transmit à son tour cette charge à son fils qui le devint en 1663. De son mariage avec Abigaël Mathieu, Lazare de Villers n’eut qu'une fille, Jeanne de Villes (x1727) à qui il transmit l'hôtel de la rue Vannerie. Cette dernière et son époux, Henri-François de Fourcy (x1713), comte de Chessy (il fut également conseiller au parlement de Paris et maître des requêtes) n'eurent qu'une fille. Souhaitant s'installer dans la capitale, ils vendirent la maison à Jean III Baillet en 1699. Avec l’acquisition par la famille Baillet, cette demeure restait en quelque sorte dans la même famille puisque Jean était le petit-fils d'un premier mariage entre Marie de Villers et Jean Baptiste Baillet. Connu pour avoir été conseiller au parlement de Dijon en 1680 puis premier président de la chambre des comptes de Bourgogne, Jean III Baillet (x1730) était baron de Saint-Julien et de Crécey et fut le père de Lazare et Mathurin Baillet. Ces derniers furent président à mortier en 1710 et chevalier baron de Saint-Julien pour Mathurin qui était le plus jeune. Ayant besoin d'argent, ils louèrent les lieux aux commandants militaires de la province de Bourgogne. Connu encore de nos jours sous le nom d'hôtel du "Commandant Militaire", la demeure était donc habitée à l'époque par le commandant Henri-Charles de Saulx (1687-1761), comte de Tavannes (il fut également Gouverneur de Bourgogne et de Bresse). A ça mort les bâtiments furent alloués à son successeur qui fut Philippe-Antoine de la Tour du Pin-Gouvernet. Mort sur l’échafaud en 1794, il avait dû en 1775 se réfugier dans son hôtel par peur d'un mécontentement populaire lié au prix du blé.


Antoine Chartraire de Montigny
Bas-relief en plâtre
Eglise Saint-Léonard à Bierre-les-Semur

Une dizaine d'année après ces événements tragiques, au cours de l'année 1783 pour être précis, l'hôtel changea une nouvelle fois de propriétaire et fut acheté par Antoine II Chartraire de Montigny (1748-1795). Ayant déjà hérité par son père Marc-Antoine Chartraire de Montigny (1703-1750), de l'hôtel du même nom, Antoine reçu de surcroît la fortune de son cousin Guy Chartraire de Ragny (1715 1783). Il fit donc procéder à de grands travaux et fit appel pour leur réalisation à l'architecte Charles Saint-Père (1738-1791). Aidé dans ça tache par le sculpteur Claude-François Attiret (1728-1804) qui avait déjà de nombreuses œuvres à son actif, Charles Saint-Père n'était pas lui non plus un novice puisqu'il s'était déjà illustré dans l'église St Léonard à Bierre-lès-Semur et pour les bâtiments monastiques de l'abbaye de Cherlieu (70). Egalement artiste son père Claude Saint-Père (1705-1780) avait réalisé le décor des parois de la chapelle des Elus et la porte de l'hôtel Chartraire de Montigny. Commencé vers 1784, les travaux permirent l'édification d'un portail dans le goût antique, un corps de logis de style néoclassique. Le gros œuvre s'étant poursuivit jusqu'en 1787, le comte de Chartraire du attendre cette époque pour décorer ça demeure dans le style Louis XVI. Le goût du luxe et du faste qu'avait ce notable à l'époque est le juste reflet de la position qu'il occupait aux états de Bourgogne. Ayant commencé ça carrière comme académicien honoraire en 1775, il se trouva par la suite propulsé au poste de trésorier général des états de Bourgogne en 1784 et finis comme chancelier de l'Académie en 1789. Préférant vivre dans l'hôtel paternel, Monsieur Chartraire de Montigny continua de louer cette demeure au Commandant militaire. Habité par celui-ci jusqu’à ce que cette charge soit supprimée en 1790, l'hôtel fut vendu en 1792 à Simon-Pierre-Bernard Ranfer de Bretenières (1738-1806).

Etant déjà propriétaire de l'hôtel mitoyen au sud et de la maison Bénigne Serre, Ranfer de Bretenières profita des troubles révolutionnaires et de l'emprisonnement à Paris en 1792 du comte de Montigny pour acheter cette demeure. Issu d'une famille d'avocat, Simon fut tout d'abord maître ordinaire en la Chambre des comptes de Bourgogne (1762) puis maire de 1802 à 1806. Il fut victime le 26 janvier d'une épidémie de typhus contracté en visitant des prisonniers de guerre rassemblés dans la caserne des Capucins. Héritant de la maison, son fils, Pierre-Bernard Ranfer de Bretenières (1766-1841) fut à son tour avocat. Il occupa tout d'abord le poste de conseiller au Parlement de Bourgogne en 1785 puis fut conseiller à la Cour d'appel de Dijon en 1811. Il continua ça progression en devenant Premier Président de la Cour Royale en 1815 puis fut baron héréditaire en 1822 et termina comme conseiller d’état en 1827. A son tour son fils Edmond Ranfer de Bretenières (1803-1882), recueilli la maison. Il fut juge du tribunal de Châtillon-sur-Seine et eu deux fils qui se destinèrent à des carrières ecclésiastiques. Attiré par l'étranger, l’aîné entra au séminaire en 1861 et fut ordonné prêtre en 1864. Peut de temps après, il s'embarque pour la Corée et devint missionnaire. Arrêter à Séoul par des soldats, il fut décapité lors d'une exécution publique. Béatifié par Paul VI, il fut canonisé en 1984 sous le nom de Saint Just de Bretenières (1838-1866).


L'abbé Christian de Bretenières
Photographie Sépia
Fin du XIXeme siècle
Plus chanceux, son frère Christian de Bretenières (1840-1914) connu un sort moins funeste. Membre de la compagnie de Jésus, il fut chanoine honoraire des cathédrales de Dijon et de Nantes et supérieur de l’école Notre-Dame de Beaune. Employant la fortune paternelle au rachat de l’hôtel Chartraire de Montigny en 1882, il fonda ainsi l'école Saint-François-de-Sale au sein des deux bâtiments. Transformant l'espace intérieur et supprimant une partie du mobilier afin d'accueillir les différentes classes, il conserva néanmoins l'aspect général des bâtiments. Il du malgré tout abattre la clôture qui séparait les deux écoles et détruire quelques vieilles bâtisses afin d’édifier des bâtiments neufs et une chapelle néo-Renaissance construite entre 1890 et 1892 par Charles Suisse (1846-1906) à partir de l'ancien pavillon Bénigne Serre de style Renaissance. Occupant dés lors le poste de directeur d'école, il vécut ici jusqu’à son décès. Après lui vint le père Glantenay qui resta en fonction jusqu'en 1936. Le père Bordet qui luis succéda du s’accommoder d'un hôpital militaire et d'un tribunal militaire Allemand pendant la seconde guerre mondiale. Durant l'après guerre, l’école reprit ces activitées et fut diriger par le père Regnier entre 1952 et 1965. A cette date, la direction de l'établissement fut confiée au père Bourland qui organisa la restructuration de l'école. Devenue vétuste, les bâtiments virent le déménagement progressif du corps enseignant entre 1969 et 1971. Acquis par le ministère de la culture à cette date, les bâtiments accueillir la direction régionale des affaires culturelles (DRAC) en 1976. L'ensemble fut ensuite restauré entre 1980 et 2002.


Particulièrement remarquable, la façade sur rue présente un portail à l'antique encadré par un appareil à bossage. Au-dessus cours une corniche décorée par des triglyphes et des métopes à feuillages. Formant un avant corps, la grande porte est encadrée par deux petites guérites qui devaient accueillir les sentinelles. Le beau travail de menuiserie de la porte centrale permet d'admirer des casques et des couronnes placées dans un tympan. Pour finir, les deux battants de cette porte sont ornés de cartouche portant la lettre "G" de la famille Gouvernet.

Attribué à Claude-François Attiret, les sculptures du portail sont plus vraisemblablement l’œuvre de Morgan, l'un de ces élèves. Empreinte, d'une symbolique guerrière, elles sont la pour rappeler au visiteur les fonctions militaires de son locataire. Représentant Mars le dieu de la guerre, la statue de gauche est assise sur un ensemble de trophées d'armes comprenant des cuirasses, des boucliers, des casques et des drapeaux. Vêtu d'une cuirasse et d'une cape à la romaine, il porte également une jupette et des jambières. Coiffé d'un casque de centurion, il s'appuie sur un bouclier décoré de foudre et tien dans ça main gauche un glaive finement orné.
Lui faisant face, la statue de Minerve symbolise la stratégie. Assise, elle aussi, elle porte un casque orné d'une chouette. Habillée d'une tunique et du pallium romain, elle porte sur la poitrine l'égide faite d'écaille et de petit serpent. Appuyé sur un bouclier à tête de Méduse, ça main gauche porte une couronne de lauriers. De l'autre main aujourd'hui coupée, elle soulevait un globe terrestre.
Eux aussi décoré, les murs à bossages portes des boucliers circulaires ornés de couronnes de lauriers et des glaives maintenus en place par des ceintures


S'élevant au-dessus de la rue et donnant sur la grande cour, le bâtiment des gardiens (ou des concierges) présente une façade à légers bossages surtout visibles dans les claveaux des grandes baies du rez-de-chaussée. Au niveau supérieur, de petites fenêtres carrées sont encadrées par un ensemble de six bustes. Le niveau des combles est éclairé quant à lui par quatre petits oculis et par une fenêtre centrale à fronton triangulaire. Placé sous celle-ci, la porte centrale forme un renfoncement surtout visible au niveau du tympan qui la surmonte. Percé d'un oculus, celui-ci est décoré d'un ensemble de feuillages
Placé dans le retour d'angle gauche, l'oratoire également appelé "poste de la sentinelle" fut construit avec un calcaire aux ton ocres. Munie de fenêtre cintrée, d'oculis et d'une porte d'entrée, il est surmonté d'une toiture en lauze. Concentrés sur les portes, la décoration comprend des guirlandes et des petits cartouches. Lui faisant face, l'escalier et le mur à balustrade métallique n'auraient aucun intérêt si ce n'est qu'il permet de voir une partie de la façade de l’hôtel Chartaire de Montigny se trouvant juste à coté.


De style néoclassique, la façade principale de l'hôtel s'élève sur deux niveaux auquel il faut ajouter les combles. Non saillant, l'avant-corps est orné d'un ensemble de quatre colonnes dorique qui soutiennent une balustrade de pierre. Au niveau des combles, le fronton triangulaire est percé d'un oculus et décoré par des ressauts dentés. Ouverte par trois grandes portes, la façade est éclairée par un ensemble de persiennes doubles répartie sur les deux niveaux. Encastrées dans la toiture, les lucarnes sont ornées de fronton semi-circulaire et de volutes de pierre. Enfin, l'architecte Charles Saint-Père plaça de petite balustrade sous les persiennes du premier et agrémenta la corniche d'une frise à pétales de rose.
Au revers de cette dernière, la façade donnant sur les jardins est précédée d'un large escalier. Orné d'une balustrade, celui-ci dispose de rampes surmontées par de gros pots de fleurs en céramique. S'élevant sur deux étages la façade est agrémentée au niveau du perron par deux grosses colonnes à chapiteaux ionique qui soutiennent un fronton semi-circulaire à entablement. Percée par de haute persienne, le premier étage est orné des mêmes balustrades décoratives et de la même corniche à bouton de rose que sur la façade située cotée cour. Assez semblable eux aussi, les combles sont éclairés par de petites lucarnes à fronton circulaire.