SAINT-HILAIRE-LA-CROIX (63)
Eglise prieurale Sainte-Madeleine du Lac-Roy


Situé à l'écart des grands axes de communication, le prieuré du Lac-Roy tient son nom d'une vieille légende remontant à la période du haut moyen-âge. Cette histoire raconte le martyr qu'endura un grand nombre de chrétiens installés sur les berges du lac de la Sep aux premiers temps du christianisme. Ceux-ci furent massacrés puis jeté dans les eaux du lac par des barbares qui vivaient dans la région. Ces eaux devenues rouges par le sang des victimes donnèrent le nom de Lac-Rouge au village qui devint par la suite Lac-Roy et qui fut transformé en La Croy pour, enfin, devenir Saint-Hilaire-la-Croix de nos jours. C'est cette légende, conservée dans la mémoire des habitants de la région pendant plusieurs siècles, qui incita peut-être un groupe de pélerins en partance pour la Terre-Sainte à venir s'installer ici. Parmi ces pélerins se trouvait un groupe de chanoines réguliers de l'ordre de Saint-Augustin. Ceux-ci, originaires de la collégiale Saint-Martin d'Artonne, entreprirent la fondation du prieuré en 1128. Devant coexister avec les moines Mozacois du prieuré Saint-Hilaire qui se trouvait à quelques lieux d'ici, ils réussirent à annexer ce prieuré en 1324.



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Devenue prospère grâce aux passages de nombreux pélerins, la communauté de moines put se permettre de construire l'église et des bâtiments monastiques tout au long des XIIème et XIIIème siècles. Conservant les murs de la nef (portail Sud) et le transept qui dataient de la fondation de l'édifice au début du XIIème siècle, les moines refirent, à la fin de ce même siècle, le chevet ainsi que le portail nord et l'intérieur de la nef. Obtenant de nombreux avantages dont celui de haute moyenne et basse justice, ils dûrent se défendre militairement et fortifier les lieux afin de se défendre contre les attaques de Pierre II de Maumont, seigneur de Tournoel-Chateauneuf qui tenta de s'emparer du prieuré en 1337. Probablement endommagé par le seigneur de Tournoel, le prieuré fut en partie restauré entre les XVème et XVIIème siècle. De cette époque datent les restaurations du clocher et des bâtiments monastiques. Abandonnant le prieuré en 1600, les religieux de Saint-Hilaire furent remplacés en 1678 par des pères Lazaristes. Ne résident pas sur place, ceux-ci assurent la gestion du prieuré et nomment les curés paroissiaux. Vendu comme bien national en 1792, le prieuré fut restauré au niveau du clocher au début du XXème siècle.




Situé juste à côté du lac, le chevet construit à la fin du XIIème siècle est constitué d'une abside semi-circulaire et de deux absidioles accolées aux bras du transept. Percés de petites fenêtres et décorés de modillons à copeaux, ces deux éléments servent à mettre en valeur l'élèvation de l'abside. Cette dernière est éclairée par trois belles fenêtres cintrées qui sont séparées par des colonnes engagées surmontées de chapiteaux. Un ensemble de modillons assure, là aussi, le soutien de la toiture.
Probablement détruit lors de l'assaut mené par Pierre de Maumont en 1337, le clocher fut muni d'une flèche au XVème siècle et restauré au début du XXème après que la flèche eut été détruite. De plan octogonal, il dispose de deux étages en pierre, percés de quatre fenêtres cintrées pour l'étage supérieur et couverts d'une toiture à quatre pans.
Les bras du transept, légèrement saillant par rapport à la nef, servent d'appui aux chapelles du chevet. Dans le prolongement du bras droit, on peut voir l'ensemble des bâtiments monastiques datant du XVème et XVIIème siècle. La grande sobriété des façades de ces bâtiments est égaillée par un petit jardin au centre duquel se trouve un puit.




Bâtie à la fin du XIIème siècle, le portail nord fut élevé par des sculpteurs influencés par le style bourguignon (pour les piliers) et par les styles limousin et mozarabe (pour le tympan polylobé). La porte est encadrée par deux piliers cannelés et huit colonnes qui soutiennent l'archivolte et le tympan par l'intermédiaire de chapiteaux sculptés. Alors que le tympan polylobé est garnie de festons sculptés à lobes très larges d'influence limousine, l'archivolte extérieure, de style bourguignonne, est ornée d'un ensemble de sept personnages parmi lesquels on distingue une représentation humaine de la Jérusalem Céleste. Les huit chapiteaux qui surmontent colonnes et piliers sont ornés d'un bestaire absolument fantastique faisant penser aux sculptures des écoles saintongeaises. On y trouve des dragons crachant des rinceaux, des masques humains vomissant des basilics, des sirènes ailées et des mange-piliers que l'on appelle également "goule".




Conservé lors des transformations entreprises par les moines à la fin du XIIème siècle, le portail sud, de style roman bourguignon, date de la construction du prieuré au début du XIIème siècle. Le tympan, qui représente le repas chez Simon le Pharisien, est de facture assez naïve. La table, sans réelle perspective, est placée juste devant Jésus qui se trouve en compagnie de Simon et de deux disciples. Marie-Madeleine, couchée devant la table, tient dans css mains les pieds du Christ qui la montre du doigt à ses convives. La fleur et le masque qui encadrent la scène complètent le décor sculpté du tympan. Les chapiteaux à crochet qui soutiennent celui-ci semble daté du XIIème siècle. Ce sont des réalisations extrêmement précoces du style gothique.




A l'intérieur, la nef romane est longue de quatre travées surmontées d'une voûte en berceau brisé sur doubleau. Les bas-côtés sont surmontés d'une voûte d'arêtes. Les colonnes, qui soutiennent la voûte de la nef ,sont ornées de chapiteaux sculptés qui présentent, pour certains, des scènes historiées. Le plus célèbre figure "la danseuse et le joueur de viole". Les autres, de facture plus simple, sont ornés de représentations diverses comme "l'homme pris à la gorge par deux bêtes à quatre pattes", "les aigles buvant dans une même coupe", "des centaures tenant fermement un homme" ou, encore, "des serpents entourant des pommes de pin".
Le choeur, de style roman, est percée de trois fenêtres qui éclairent une voûte en cul-de-four. Il est précédé par une croisée du transept voûtée d'ogives qui laissent à penser que cette partie fut refaite à l'époque gothique. La présence de nombreux culots sculptés à l'intérieur de l'édifice atteste que quelques modifications furent apportées à cette époque.
Seul élément datant de la Renaissance, la statue de Sainte-Marie-Madeleine est une très belle oeuvre en pierre polychrome datant du XVIème siècle. D'origine inconnue, cette sculpture, d'une grande finesse, est exposée dans une niche du bas-côté droit.