Le PUY-EN-VELAY (43)
Cathédrale Notre-Dame et bâtiments annexes
(voir la page d'accueil du Puy-en-Velay)



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Le rocher Corneille sur lequel est implanté la cathédrale était appelé le Mont Anis durant l'antiquité. Avec la ville de Ruessium (Saint-Paulien), ce lieu était l'une des principales agglomérations du Vellay à cette époque. Dès la période Celtique, un dolmen avait été érigé au sommet du Mont Anis afin que les druides puissent y célébrer leurs rites païens. Au début du premier siècle aprés Jésus-Christ, ce monument fût enfermé dans un temple romain dédié à Adidon (une divinité locale) et à l'empereur Auguste. Les fouilles entreprises à la fin du XIXeme siècle nous permettent de savoir que ce monument avait la taille de la maison Carrée de Nîmes. Parmi les bas-reliefs réutilisés dans la cathédrale, il convient de citer celui de Sextus Talonius Musicus (dédicace à Adidon et Auguste), la scène de chasse dans la petite cour et les joueurs de Latruncules déposés au musée Crozatier.
Comme un grand nombre de haut-lieu de la foi chrétienne, celui-ci n'échappe pas à la règle d'une fondation légendaire. En effet, l'histoire qui se situe vers le milieu du Ier siècle raconte qu'une veuve atteinte d'une forte fièvre se rendit au sommet du Mont Anis après avoir eu une vision. Elle s'y endormie. A son reveil, sa fièvre ayant disparu, elle eu la surprise de voir la Vierge posée sur le dolmen païen. Celle-ci lui demandait de construire une église à cette endroit. Prévenu de ce miracle, Saint-Georges, premier évêque du Vellay qui résidait à Saint-Paulien, entreprit le voyage. A son arrivée, il fût surpris de voir le sol recouvert de neige alors qu'on était en juillet. De plus, un cerf traçait le plan d'un vaste édifice en enfoncant ses sabots dans la neige. Le saint évêque n'ayant pas les moyens de construire une église, il se contenta d'y planter des haies de buisson qui fûrent recouvertes de fleurs dès le lendemain. La légende ne s'arrête pas là puisque, trois siècles plus tard, un nouveau miracle survint. Cette fois-ci, il s'agissait d'un paralytique qui avait guéri en venant dormir sur la pierre. A son réveil, la Vierge renouvellait son voeu de faire construire une église. Vozy, qui était évêque à cette époque, parti à Rome afin d'avoir l'autorisation nécessaire à la construction de l'édifice. Le saint-siège le fit aider dans sa tâche par l'architecte et évêque Scutaire qui érigea l'église. Aprés avoir terminé les travaux, ceux-ci repartirent à Rome pour obtenir la consécration du monument. Il fûrent arrêté en chemin par deux vieillards qui leur demandèrent de retourner à la cathédrale et d'y emporter des reliques. Les anciens les quittèrent en leur disant ces paroles : "nous vous précédons et vaquerons à tout". A leur retour dans la ville, Scutaire et Vozy découvrirent leur église baignant dans une lumière surnaturelle et des anges faisant sonner les cloches.



La réalité historique et les recherches archéologiques nous permettnte de faire le tri dans ces légendes. L'épitaphe inscrite sur un linteau de porte nous apprend en effet que le saint fondateur de l'église n'est autre que Scutaire. Entre 415 et 430, celui-ci édifia un bâtiment à une seule nef d'une longueur de 24 mètres environ. Une fois l'édifice achevé, il transféra le siège épiscola de Saint-Paulien au Mont Anis qui était plus facile à défendre. Comme l'ancien dolmen druidique était toujours debout, Scutaire décida de l'intégrer au nouveau monument en le placant dans le choeur. Ainsi, cet ancien symbole païen allait devenir au fil du temps le dernier vestige des apparitions de la Vierge (on le connait de nos jours sous le nom de pierre de l'Apparition). Aprés sa mort survenue vers la fin du Veme siècle, son corps fût déposé dans un sarcophage placé dans l'église. Dans ses chroniques rédigées en 591, Grégoire de Tours nous apprend que la ville d'Anicium (Le Puy-en-Velay) était devenue un lieu de pélerinage très fréquenté. En 593, la ville devint l'évêché de toute la région Vellave. C'est cette notoriété qui obligea très probablement l'évêque de construire des bas-côtés afin de contenir la foule des fidèles. Durant le VIIIeme siècle, l'église fût de nouveau allongée pour gagner de la place. A la même époque, une nouvelle doctrine venue d'Orient interdisant la possession d'objet païen contraignit l'évêché à detruire en partie le dolmen sacré. On ne conserva que la partie supérieure qui fût encastrée dans le pavage de l'église. Suite au voyage qu'entreprit l'évêque Godescalc jusqu'à Compostelle vers 950, la ville allait devenir l'une des principales étapes vers le tombeau de Saint-Jacques. La foule déjà immense qui passait dans l'ancienne Anicium allait être encore plus nombreuse après qu'un moine Allemand nommé Bernhard ait prévu la fin du monde pour le 25 mars 992. A cette date, qui était à la fois un vendredi saint et le jour de l'Annonciation, les habitants et les pélerins fûrent si nombreux que le saint-siège décreta que cette journée serait celle du Jubilé. Un autre fait marquant de l'histoire eu également lieu dans la ville. En effet, c'est du Puy que le pape Urbain II fit le voeu en 1095 de voir le tombeau du Christ délivré des infidèles. Il nomma à la tête de cette première croisade l'évêque Adhémar de Monteil. Celui-ci fût tué en 1098 alors qu'il venait de délivrer la ville d'Antioche.



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Ces grands évènements historiques et l'apport monétaire qu'ils générèrent permirent aux maîtres d'oeuvre de réaliser de nouvelles campagnes de travaux afin de contenir la masse toujours grandissante de pélerins. On sait que la troisième et la quatrième travées fûrent ajoutées entre 980 et 1050. Les deux dernières travées, qui datent de la seconde moitié du XIIeme siècle, fûrent bâties au-dessus du vide grâce à un astucieux système de pilier. La série de fresques qui ornent le transept et la tribune date de la fin du XIeme et du début du XIIeme siècle. La façade qui domine la ville date de la fin du XIIeme siècle. De la même époque date le porche du For qui possède de superbes chapiteaux. Le superbe cloître roman qui était réservé aux chanoines séculiers de la ville est ajouté au début du XIIIeme siècle. A son retour de croisade en 1254, Saint-Louis aurait confié au chapitre de la cathédrale les reliques de la Vierge noire qu'il aurait ramené de terre sainte. Le bâtiment des machicoulis qui cache le cloître fût couvert de son système defensif vers la même période (auparavent, la salle des états du Velay qu'il abrite était couverte d'une voûte en berceau). Par la suite, et ce jusqu'aux travaux du XIXeme siècle, la cathédrale reçu essentiellement des tableaux, du mobilier et des objets précieux. Parmi ceux-ci figure le tableau peint par Jean Solvain en 1630 et intitulé le voeu de la Peste. D'autres pièces de mobilier (maître-autel et chair) fûrent sculptées en 1723. En période révolutionnaire, la cathédrale n'eut pas trop à souffrir des dégradations. Toutefois, en 1794, les représentants de la république firent brûler la statue de la Vierge noire sur la place du Martouret. Dans la seconde moitié du XIXeme siècle, les architectes Mallay et Mimey entreprirent des travaux dans le chevet, le clocher et le cloître (qui fût partiellement reconstruit entre 1850 et 1857). A partir de 1885, c'est l'architecte Victor Petitgrand qui reprend les travaux et qui reconstruit l'ancien clocher roman de forme pyramidale. Enfin, les travaux du XXeme siècle permirent de recréer l'entrée originelle de la cathédrale en faisant arriver les visiteurs directement dans la nef.




Il faut gravir un escalier de 134 marches pour enfin arriver devant la façade principale de la cathédrale. Cette façade romane construite à la fin du XIIeme siècle est influencée par l'art oriental. Elle dispose de trois porches formés par des arcs en plein cintre et dispose de cinq étages se terminant par des clochers-peignes. La décoration, qui s'apparente aux ornementations mozarbes, est constituée de pierres polychromes venant de carrières locales et formant comme une mosaïque à la dominante de rouge, de blanc et de noire.
En contournant la cathédrale par la droite, on parvient au niveau du porche du For datant de la fin du XIIeme siècle. Cette construction, d'une grande richesse artistique, est constituée de deux grandes arcades se décomposant en une multitude d'arcs retombants sur des colonnes cannelées et gaufrées. L'ensemble des chapiteaux sculptés qu'abrite le porche illustrent pour la plupart les sept péchés capitaux. On retrouve, entre autre, un visage grimaçant figurant la Colère ou un chien grinçant des dents qui illustre l'Envie. Sur d'autres chapiteaux sont représentés la Paresse (homme assis exposé au soleil), la Luxure (qui est symbolisée par deux sirènes possédant deux queues) et Adam et Eve sur l'un des chapiteaux de la porte du transept. Cette porte (que l'on appelle également "porte papale") est ornée d'un tympan sur lequel est inscrit l'épitaphe à Scutaire. L'ensemble du porche est couvert d'une voûte d'ogive retombant sur une main sculptée dans l'angle nord-ouest. Un étage abritant une chapelle fût rajouté au XIVeme siècle.
De l'autre coté du transept se trouve un beau porche du XIIeme siècle que l'on connait sous le nom de porche Saint-Jean. Celui-ci est constitué d'une porte recouverte de cuir sur laquelle sont appliquées des pentures en fer forgé. Ce porche communique avec le baptistère Saint-Jean dont l'entrée est gardée par deux lions en pierre. Ce joli monument datant du XIeme siècle est muni à l'intérieur d'une cuve baptismale de forme pyramidale qui servit jusqu'à la révolution.
En faisant le trajet sous la cathédrale, on accède à deux superbes portes du XIIeme siècle connues sous le nom de porte "de Cèdre" et Porte Dorée. La première, qui est en fait constituée de pin, est sculptée de scènes religieuses (enfance du Christ, baiser de Judas, sainte femme au tombeau...). La seconde, qui est encadrée par deux colonnes en porphyre d'origine antique, est muni de battants recouverts de fer forgé. A côté de cette porte se tient le vestige du dolmen de la Vierge conservé sous forme de pierres encastrées dans le palier.
Le clocher qui domine l'ensemble de la cathédrale fût refait par Victor Petitgrand en 1887 sur les bases du clocher roman du XIIeme siècle. Il en conserve la forme pyramidale constituée de sept étages. Chaque niveau est percé par des arcs trilobés de tailles différentes. La sculpture de l'ensemble des chapiteaux (malheureusement invisible à l'oeil nue) présente des thèmes variés comme les Atlantes, un adoubement de chevalier ou une scène de l'Apocalypse.
La partie basse du chevet (que l'on peut voir dans la petite cour du puit) conserve le témoignage d'une occupation gallo-romaine. En effet, on y voit des vieilles pierres sculptées du Ier siècle parmi les autres blocs de maçonnerie. Ces fragments de l'ancien temple de Adidon et Auguste représentent des scènes de chasse, des inscriptions latine et des amours désarmant Hercule.




L'accès vers l'intérieur de l'édifice se fait de nouveau en empreintant le passage souterrain qui conduit directement dans la nef. Celle-ci fût conçue entre le Xeme siècle et la fin du XIIeme siècle. Pour permettre aux six travées de la nef de prendre place au sommet du rocher Corneille, il fallut soutenir les deux dernières travées par d'énormes piliers. Les bas-côtés, qui encadrent la nef, sont voûtés d'arêtes et sont percés par de grandes fenêtres cintrées qui éclairent l'ensemble de la cathédrale. Le voûtement de la nef fonctionne par série de deux travées. Les deux premières sont couvertes de coupoles octogonales sur trompe. Les suivantes sont surmontées d'un tambour orné de huit arcades sur colonnette. Les deux dernières sont voûtées de coupoles barlongues. Les sculptures qui ornent les chapiteaux de la nef montrent des scènes variées comme les Vices et les Vertus, des hommes assis dans de la végétation, des animaux extraordinaires, des oiseaux...
Les bras du transept dans lesquels prennent place des chapelles aux fresques du XIIeme siècle sont surmontés par des tribunes percées de baies cintrées. La croisée du transept est terminée par une tour octogonale supportée par quatre gros piliers rectangulaires et surmontée d'une coupole.
L'ensemble du vaisseau est terminé par un choeur à fond plat voûté en berceau et illuminé par des baies en plein cintre. C'est dans celui-ci que se trouve l'actuelle Vierge noire datant du XVIIIeme siècle.




L'intérieur de la cathédrale et les bâtiments annexes possèdent un grand nombre d'oeuvres d'art allant de la fresque médiévale au mobilier liturgique en passant par des sculptures, des tombeaux et des peintures sur toile. La nef et les deux tribunes du transept sont ornées d'une série de fresques du XIIeme siècle. Dans l'une des travées de la nef est représentée une Vierge de majesté d'inspiration byzantine. La chapelle du bras gauche abrite une fresque romane illustrant le Martyre de Sainte-Catherine d'Alexandrie et les Saintes Femmes au tombeau. La tribune, qui surmonte l'ensemble, est ornée d'une fresque de Saint-Michel haute de 5 mètres 50. On le voit vétu de superbes habits et posé sur le dragon qu'il vient de tuer. Un ensemble de fresques tirées de l'Ancien Testament complète la décoration de la tribune.
D'autres peintures comme le tableau de Jean Solvain (voeu de la Peste, 1630), la peinture des Arts libéraux du XVeme siècle qui orne la chapelle des reliques ou l'Adoration des Mages de Claude Vignon et la Sainte Famille du Maître de Flémalle (toutes deux visibles dans le Trésor d'art religieux) donnent une meilleure idée des richesses conservées dans la cathédrale.
Dans la nef et le choeur sont conservés la chaire et le maître-autel en bois sculpté datant de 1723. C'est sur celui-ci qu'est posé la Vierge noire datant du XVIIIeme siècle (l'originale, qui était peut-être une statue de la déesse Isis, fût brulée durant la révolution). Le buffet d'orgue et les boiseries réalisées par Pierre Vaneau datent du milieu du XVIIeme siècle. L'ensemble a la particularité d'être installé derrière le choeur.
Comparé à la grande quantité d'évêques, de chanoines et d'abbés qui occupèrent les lieux, on retrouve peu de tombeau leur ayant appartenu. Toutefois, la sépulture de Jean Brun datant de 1341 et celle d'un abbé coiffé d'une mitre sont intéressantes.
Les deux salles contenant les trésors de la cathédrale conservent des pièces magnifiques comme une pièta du XVeme siècle, un Christ en ivoire, des tableaux du XVIIeme siècle, l'Esclave de Pierre Vaneau datant de la fin du XVIIeme siècle, une chasse en émail champlevé du XIIIeme siècle et la superbe bible de Théodulphe datant du VIIIeme siècle.


Protégant la ville grâce à un système défensif unique en son genre, le bâtiment des machicoulis nous rappelle que la cité épiscopale se devait également de protéger les fidèles. La construction de ce monument de cinq étages se fit en deux temps. Au milieu du XIIeme siècle, on réalisa la grande bibliothèque (maintenant la chapelle des reliques) et l'on rajouta au-dessus la salle des Etats du Velay qui abrite de nos jours le trésor d'art religieux. Vers la fin du XIIIeme siècle, on rajouta un nouvel étage défensif que l'on munit de machicoulis crénelés reposant sur des contreforts. A l'intérieur, la chapelle des reliques conserve une superbe peinture du XVeme siècle représentant les Arts Libéraux. Sur cette oeuvre, on découvre quatre jeunes femmes symbolisant la Grammaire, la Logique, la Rhétorique et la Peinture. L'étage superieur, qui abritait autrefois la salle des Etats du Vellay, est couverte d'une voûte en berceau. Dans cette salle est conservée une grande partie des objets d'art religieux de la cathédrale. Les parties basses du bâtiment des machicoulis accueille les celliers et la chapelle du Saint-Esprit. Jusqu'en 1845, un donjon carré complétait au nord cet ensemble militaire. Sur ordre de l'architecte Mallay, cette tour Saint-Mayol fût détruite afin de gagner de la place.




Considérée par Mérimée comme étant le plus beau cloître de France, cette construction romane des XIeme et XIIeme siècles complète admirablement la visite de la cathédrale. Bien qu'il fût presque entièrement restauré par Mallay et Mimey entre 1842 et 1853, ce monument a conservé tout son charme. Sur les quatre galeries du cloître, seule la galerie sud est d'époque romane. Malgré cela, il se dégage beaucoup de grâce de cet ensemble de sculptures et de mosaïques de pierre. Les arcades reposent sur des grosses piles flanquées de colonettes monolithes. Les archivoltes sont constituées de claveaux noirs et blancs. L'ensemble est surmonté d'une frise formée de losanges noirs, blancs et rouges. Au-dessus culmine une corniche sculptée qui court tout le long du cloître. Les chapiteaux qui ornent le sommet des colonnes sont pour la plupart du XIIeme siècle. Un certain nombre d'entre eux sont historiés. On y voit par exemple un ange enlevant une âme à deux démons, une dispute entre un moine et une abesse, une course de centaures, deux lions liés par une même chaîne, des colombes buvant dans un calice, les symboles des quatre évangélistes, le Vice l'emportant sur la Vertu ou la dispute d'une crosse abbatiale. Le reste des chapiteaux est décoré de motifs végétaux.
La galerie Est communique avec l'ancienne salle capitulaire du XIVeme siècle. Cette salle, dont l'entrée est ornée de pilastres cannelés à double ondulatio,n servait de chapelle mortuaire aux chanoines de la cathédrale. A l'intérieur sont disposés les dalles mortuaires des anciens chanoines et l'on peut également y admirer une superbe fresque du XIIIeme siècle évoquant la Crucifixion du Christ. La galerie Ouest est fermée par une superbe grille en fer forgé du XIIeme siècle dont le travail de ferronnerie rappelle l'art Mauresque.